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JOURNAL

DES AVOUÉS.

On cL'poso les fxemplaircs exigus par la loi pour la conservalioii du dioit de propriété.

PARIS, IMPEUIKBIK DK E. POCHARD,

me du Pot-de-Fer, n" if\.

RECUEIL GENERAL

I)ES LOIS, OP.DOWANCES ROYALES, DECISIONS LU CONSEIL DfiTAT ET DES MINISTRES, ARRÊTS DE LA COUK DE CASSATION ET DES COURS ROYALES SUR DES MATIÈRES DE PROCÉDURE CIVILE, CRIMINELLE OU COMMERCIALE:

Rédigé par A. CHAUVEAU,

AVOCAT A L\ idVn nOTALE DE P4RIH.

NOUVELLE ÉDITION

De la Jurisprudence des Cours souveraines, et des 22 volumes du Journal des Avoués , publiés par M. CoIBnières, relbndus et mis dans un double ordre alphabétique et chronologique, contenant l'universalité des lois et des arrêts sur la procédure, rendus depuis l'instilulion de la Cour de cassation jusqu'en 1820 inclusivement.

Ouvrage dans lequel la jurisprudence est précédée de l'iiislorique de la lé- gislation , et suivie de l'Examen de la doctrine des auteurs , et de la dis- cussion de toutes les questions de procédure que les arrêts n'ont pas encore résolues.

TOME DOUZIEME.

m mumk

A PARIS,

AU BUREAU DU .TOURNAL DES AVOUÉS Piue de Condé , 28 , faub. St. -G.

1828.

ABREVIATIONS.

Les mêmes que celles détaillées en têle du onzième volume.

JOURNAL

DES AVOUÉS.

V\\\\\\VVI\\\\\VVVWWSVV\\*V\\V\\\VVXV\VWV\\V\VV\VIVWW'V\W'VVVVW\WVH\»\W\;»\XVV\%^

ÉVOCATION.

On nomme ainsi raction d'enlever à un tribunal la con- naissance d'une affaire et de confier à un autre le pouvoir de la décider.

On lisait dans l'ordonnance de «667, lit. 6, art. 2. , une disposition ainsi conçue : Défendons aussi à tous juges , sous les mêmes peines , et de nullité de ieurs jugcîncns, d'évoquer les causes^ instances , et procès pendans es justi- ces inférieures, ou autres juridictions, sous prétexte d'ap- pellation , ou connexité de matière ; si ce n'est pour tirer les parties définitivement d affaire , en l'audience et sur- le-champ par un seul et même jugement. Sous l'empire de la législation intermédiaire, on ne trouve aucun texte préci- sément relatif à l'évocation , et ici nous n'examinons que le pouvoir d'évoquer , attribué aux tribunaux d'appel ; seule- ment la loi d'août 1790, proclame les deux degrés de juridic- tion , et l'art. 17 du tit. 2 contient celle disposition; ([uc « l'ordre constilutionel des juridictions ne pourra être troublé, ni les justiciables distraits de leurs juges naturels, par au- cune commission , ni par d'autres attributions ou évocations que celles qui seront déterminées par la loi. » Et la loi de bru- maire an 2 défend aux tribunaux d'appel de s'occuper des demandes qui n'avaient pas été formées devant les juges de 1" instance. Sous l'empire de cette dernière loi , on n'a- vait point à examiner quand il y avait lieu à renvoyer ou à retenir par suite de réformalion des interlocutoires, puis- XII. I

Z6G ÉVOCATION.

qu'elle interdisait l'appel tant de ces jugemens que des jugc-

mens slniplcincnt préparatoires, avant le jugement définitir.

Un grand nombre de décisions delà cour suprême a sup- pléé à ce silence de la loi. On les trouvera notées en tête du sommaire, ri «ions n'en avons parlé que d'une manière abréviative, parce qu'elles perdent beaucoup de leur impor- tance à raison de la disposition très générale delà nouvelle loi.

Un seul article du code de {uocédure civile parle de l'évo- cation , cl nous devons faire remarquer que nous ne confon- dons poiist, sous ce mot, les demandes en renvoi ou en règle- ment de juges.

Voici le texte de cet article : « Lors(ju'il y aura appel d'un jugomenS interlocutoire, si le jugement est infirmû, et que la matière soit disposée à recevoir une décision définitive , les cours royales ou autres tribunaux d'appel pourront sta- tuer en même temps sur le fond définitivement et par un seul et même jugement. Il en sera de même dans les cas les Cours royales ou autres tribunaux d'appel , infirme- raient, soit pour vice de forme , soit pour toute aulre cause , des jugemens définitifs. » Toutefois il faut bien remarquer que ce n'csl plus pour le juge d'appel une obligation , mais une facuUé que révocation, dans quelque cas que ce soit (i). L'ensemble de ces dispositions et surtout ces derniers mots, toute autre cause , OEit donné lieu à beaucoup d'arrêls qu'il est utile de consulter ; car il est encore des questions sur les- quelles la jurisprudence n'est pas fixée d'une manière satis- faisante. Telle est l'opinion de M. Carré, t. 2, p. 206, note 2, qui s'est ainsi exprimé sur cet article : « Les diificultés que présente continuellement l'application de l'art. 4/"3, par les contradictions réelles ou apparentes que l'on trouve , soit entre les décisions antérieures ou postérieures à la publication du code de procédure, soit entre les dernières elles-mêmes ,

(1) Voy. arrêt du 9 mars iSaS, J. A., t, 29, p. 60, et M. Carr., t. 2 , p. 208, alinéa 2«, et Haut., p. 27^.

''t

ÉVOCATION. 367

nous ont déterminé pour pins de clarté et de brièveté , à fournir snr cet article une doctrine générale, au lieu de traiter isolément toutes les questions auxquelles il donne lieu. »

SOMMAIRE DES QUESTIONS. . ^

PREMIÈRE PARTIE. ,t

Jurisprudence anciewic (i).

§ 1"". Les jugLS d'api^el violent le principe des deux degrés de juridic- tion lorsque trouvant que les premiers juges avaient jugé sans que l'inslruc- lion fut coniplèle, ils renvoient devant qui de droit pour la compélence. (Arrêts de la Cour de cass. , section civile, des 24 prairial, 12 thermidor an VIII , et 24 brumaire an ix.) § 2. Lorsque les juges d'appel confirment un jugement de première in- stance qui a rejeté des fins de non recevoir, ils ne peuvent retenir la con- naissance du ibnd , les premiers juges en restent saisis. (Arrêt de la Cour de cass. , seet, des requêles, du 6 vendémiaire an xi. ) § 5. Les juges d'appel doivent retenir le i'ond en annulant le premier ju- gement pour vice de foruie.

(Arrêts de la Cour de cass. , sect. civile, des 3o frimaire an xi et 3o ventôse

an XII. ) S 4- Le tribunal d'appel qui déclare nulle une enquête ordonnée par un juge de paix en matière posstssoire, peut évoquer le fond. (Arrêts de la Cour de cass. , secl. civ. , des 24 ventosc cl 17 prairial an xi. ) § 5. Un tribunal d'appel ne peut statuer sur le fond lorsqu'il infirme un jugement qui a prononcé un renvoi pour cause de litispendance.

(Arrêt de la Cour de cass., sect. civ. , du 28 nivosc an xi. ) § 6. Les juges d'appel peuvent statuer sur le fond en annulant le juge- ment de première instance qui avait admis une demande en péremption. (Arrêt de la Cour de cass. du 27 germinal an xi. ) § 7. Les juges d'appel doivent en ordonnant un interlocutoire faire faire la preuve devait eux, et statuer sur le fond au lieu de renvoyer devant les premiers juges.

(Arrêts de la Cour de ca«s. des 2 1 floréal an xi , et 19 novembre 1S08. Ce dernier arrêt a é.té rendu sous l'empire de l'ancienne loi.) .rr

(1) M. Carré, t. 2, p. 208 et 259, a cité toutes ces décisions en indiquant les inductions qu'on pourrait en tirer sous l'empire de la nouvelle loi. <

368 ÉVOCATION.

§ 8. Lorsque les juges de première instance ont ordonné un avant faire droit sans s'occuper du fond, la cour d'appel peut évoquer le fond si les parties y concluent.

(Arrêts de la Cour de cass., sect. civ. , des lo et 17 prairial an xi.) § g. On peut se faire un moyen de cassation contre un arrêt d'appel de ce qu'en infirmant un jugement interlocutoire il n'a pas statué sur le fond. (Arrêt de la Cour de cass. , sect. civ. , du 22 messidor au xii. ) § 10. Lorsque les juges de première instance ont statué sur le fond en refusant une mise en cause demandée , la cour d'appel peut , en ordonnant cette mise en cause, évoquer le fond.

(Arrêt de la Cour de Bruxelles du 2 pluviôse an xiii. )

SECONDE PARTIE.

Jurisprudence nouvelle.

En quel cas l'évocation est-elle permise aux tribunaux d'appel lorsqu'ils infir- ment un jugement comme ineompétemment rendu ? 1. Les tribunaux d'appel peuvent -ils évoquer le fond lorsqu'ils infirment le jugement pour avoir été rendu par un tribunal irrégulièrement composé? 6 et 17. Les tribunaux d'appel peuvent-ils évoquer le principal dans le cas l'appel ne porte que sur un jugement de provision? 2 et 24-

Cas ou l'évocation bst permise. .... Lorsqu'un jugement est annulé pour avoirélé mal à propos rendu en vacation, aa. .... Lorsqu'une action en désaveu d'un enfant a été rejetée en première instance par des fins de non re- cevoir, 20. ...Lorsqu'il y a une infirmation sur l'appel d'une ordonnance de référé, 26. La cour investie par suite d'un renvoi après cassation, du droit de statuer sur un arrêt interlocutoire, peut, en l'infirmant, évoquer le fond, quoique, pendant l'instance en cassation, la cour dont l'arrêt in- terlocutoire a été rendu, ait rendu dans la cause un arrêt définitif, 3i. La cour qui a annulé la nomination d'un curateur à une succession vacante peut désigner elle-même un autre curateur, 25 àla note, En matière correctionnelle, les juges d'appel doivent évoquer le fond lorsque les premiers juges se sont mal à propos déclarés incompétens, 25. Dans l'ancien droit , les tribunaux d'appel étaient forcés d'évoquer en cas de déni de jusiice des premiers juges , 4-

Cas ou l'évocation n'est rASPFBMisii. ....Quand l'action elle-mêmeest an- nulée, 5. .... Quand les tribunaux d'arrondissement annullent un juge- ment de jusiice de paix comme ineompétemment rendu, 21. ...Quand le jugcmentn'a statué que sur une nullité d'exploit, 10. ... Lorsqu'il n'a pas été pris de conclusions au food eo première instance, 3o. .... Dans

ÉVOCATION. 369

le cas d'un renvoi jtour conncxità , lorsque le premier juge n'est pas dans le ressor! du tribunal d'appel, 7.

QiESTiONS DivERSKs. Lorsquc l'objet de la conlestation n'excède pus le taux du dernier ressort, et qu'on se pourvoit en a|)pel pour incompétence , les juges d'appel ne peuvent pas annuler le jugement attaqué , par d'autres motifs qun ceux tirés de l'incompétence , ly. Lorsqu'un tribunal d'ap- pel réforme pour cause d'incompétence et évoque, il doit statuer par un seul jugement, 9, n et i^. ... Cependant il peutavant d'infirmer ordonner une mesure préparatoire, 2j. .... Doit-on admettre une autre exception lorsque la cour réforme un jugement définitif? 25. Si dans un premier arrêt une Cour en infirmant le jugement atlaaué a mal à pro- pos renvoyé à une audience subséquente pour statuer sur le fond, elle peut par un arrêt postérieur , rapporter son arrêt d'évocation , et renvoyer le fond devant les premiers juges, 1 5. —L'incompétence des tribunaux d'appel en cas d'évocation n'est pas couverte par cela seul que les parties ont volontairement concouru à l'instruction sur le fond, 12. .... Surtout si une d'elles fait défaut et que l'une des comparantes agisse en qualité de tuteur , 5.

Questions ÉiHÂNGtiRES a l'artici.b. Lorsqu'il s'agit d'une demande en res- cision de partage , l'exploit est suffisamment libellé s'il y ert dit que la de- mande est fondée sur le dol et sur une lésion de plus du quart, i3. Le jugement rendu sur une aifaire sujette à communication au ministère pu- blic est nul lorsqu'elle n'a pas été communiquée , 18. Les jugemcns ou arrêts par lesquels Us tribunaux ordonnent une enquête ou un autre acte quelconque tendant à l'instruction du procès , sont sufiisamment motivés lorsqu'ils énoncent que les jugemens ou arrêts sont rendus avant faire droit, 28. On ne peut faire résulter un moyen de cassation de ce qu'en ordonnant une expertise un arrêt a ordonné que les nouveaux experts pro- céderaient en présence des anciens (experts et des fonctionnaires publics de la commune ûii ils doivent 1 emplir leur mission, 29. Lorsqu'il y a eu partage dans un tribunal, les parties ne peuvent prendre de nouvelles conclusions après qu'il a été appelé de nouveaux juges pour vider le partage, 16. Le juge non pris à partie ne peutêtre condamné aux dé- pens, 8. AeioEiTiis. Auteurs qui ont parlé de l'évocation , 3a.

I . En quels cas V évocation csL-elle permise aux tribunaux d'appel, lorsqu'ils infirment un jugement comme in- cowpétemment rendu ? ( Art. 473 , C. P. C. )

Nous l'avons déjà dit: L'art. 473 contenant des dispositions

370 ÉVOCATION.

toîJlcs nouvelles, puisqu'aupaiavant ce n'était que par induc- tion lies lois de 1790 et de brumaire an 2 que lYvocation était permise , la jurisprudence intermédiaire ne nous paraît utile que sous le rapport historicjue, aussi n'en donnerons- nous que l'analyse par ordre chronologique, tandis que nous rapporterons textueilcment les arrêts rendus sous l'empire du code.

§ 1". Les juges d'appel peuvent évoquei le fond ^ quoique les premiers juges n'aient statué que sur une question de compétence et se soient déclarés incompélcns. Ainsi jugé par la seciion civile, les 17 et 26 vendémiaire an 8, i5 nivôse an 9, aS germinal et 21 ilotéal an 10, 20 ven- démiaire, 3o frimaire, 2 ventôse et 28 floréal an 11, 14 mes- sidor et G tlierniidor an i5. Cependant le contraire a été décidé [)ar la niétue Covu' , Ils 21 brumaire et 11 ventôse an 10, et le iG brumaire an i3. Ces nombreux arrêts dé- montrent l'insuffisance de la loi sur l'évocation avant l'art. 473, C. P. C.

§ 2. Les juges d'appel peuueiit-ils évoquer le fond lors- qu'ils déclarent le premier jugement nul comme incom- pétemnient rendu ?

La négative a été décidée par un arrêt de la seciion civile de la Cour de cassation , du 27 frimaire an 11. Voy. le § précédent.

§ 3. Une cour peut, en infirmant un jugement par lequel un tribunal s^cst mal à propos déclaré incompétent , sta- tuer sur le fond, sans renvoyer devant les premiers juges. (Art. 473, C. P.C.)

1" EspiîCE- Le 6 février 1807, jugement qui, sur une de- mande en nullité de sentence arbitrale , déclare l'incompé- tence ; appel et le 20 mai 1807 , arrêt de la Cour de Turin , ainsi conçu : » La Cour ; Considérant que, d'après les principes de la matière , qui étaient en vigueur dans la 27^ division militaire, soit à l'époque oia le jugement arbitral fut rendu, soit à celle l'appelant porta en conciliation, et

ÉVOCATION. 57»

ensuite par devant !e tribunal de i"^" inslance, l'aclion de nullité par lui inlentt^e conlre ledit jugement, il est hors de eontestalion que la counaissanee d'une telle action apparte- nait en premier ressort aux tribunaux de première instance ; Qu'en conséquence le tribunal de Verceil , en se bornant à se déclarer incompétent, sans prononcer sur le fond ties moyens de nullité portés à sa décision , a évidemment con- trevenu auxdiîs principes; Qu'il est vrai que, dans ses considérations, le tribunal a voulu motiver son incompétence sur l'insuffisance desdits moyens; mais il n'est pas moiiis vrai que la déclaration d'incompétence par lui prononcée , n'est point régulière , puis(|ue ce n'était pas la suffisance desdiîs moyens qui le rendait compétent, mais bien l'action en nul- lité qui avait été portée à sa connaissance ; Vu l'art. 47"^ , C. P. C. , sous l'empire duquel l'instance en appela été in- troduite, et d'après lequel, dans le cas qu'ua jugement déGnitif soit infirmé, pour quelque cause que ce soit , les Cours ou autres tribunaux d'appel sont autorisés à statuer en même temps sur le fond définitivement , toutes les fois que la matière est disposée à recevoir une décision définitive ; Considérant qu'en l'espèce , les moyens de nullité opposés par l'appelant au jugement arbitral dontil s'agit sont; de leur nature, eu état d'être jugés déOiiitivement par un seul et même jugement, comme on le verra ci-après; Qu'en con- séquence rien ne s'oppose à ce que la Cour statue définitive- ment par le même arrêt sur !e fovid de l'afTaire. Invoque. »

2' Espèce. Le sicar Lassi-s Camon , assigné en réinté- grande devant le juge de paix , pour s'être permis d'arrêter un cours d'eau sur ses propriétés, appelle eu garantie le .sieur Saint-Arroman de qui il disait tenir le droit contesté. Le juge de jîaix statue sur la réintégrande, et se déclare ia- compétent sur la garantie, attendu (ju'une telle demande se liait nécessairement à la question de propriété. Sur l'ap- pel , le tribunal de St-Gaudens accueille la demande en ga- rantie. Pourvoi en cassation , et le 1 1 janvier 1809, arrêt de la

372 EVOCATION.

seclion des requêtes, ainsi conçu : « La Cour, vu l'art, 4^3 C. P. C, et considérant ([u'il a été reconnu et fîéclaré en fait, par ie jugement dénoncé , que le sieur Saint-Arroman s'était obligé à garantir le .«■ieur Lassus Camon de la voie de fait (jui a donné lieu à l'aclion en réintégrande dirigée contre ie sieur Lassus, ce qui a suifi pour autoriser le tribunal de St-Gaudens , tant à infniner la disposition par laquelle le juge de paix du canton de JMontréjean s'était déclaré in- compétent, pour prononcer sur la demande en garantie for- mée parle sieur Lassus contre le sieur Saint-Arroman, qu'à adjuger cette garantie; Rejette , etc. »

3' EspIlce. Des difficultés s'étant élevées entre le sieur Jamet et le sievir Baboin sur la vente d'un immeuble dont celui-ci était pra[>riétaire , les parties se présenîèrent devant le tribunal de commerce d'Is>cngeaux, qui, par jugement du 2g juin î8o8, ordonna le partage de l'immeuble entre les parties. Sur l'appel, la Cour de Riom annulla le jugement comme rendu par des juges incompélcuH ratione materiœ, et statuant par jugemenlnouveau, annuHa la vente. Pourvoi eu cassation, et le aS janvier i8:i, arrêt de la section civile par lequel : « La Cour, aîlendu que la Cour d'appel de Riom a déclaré qu'elle trouvait l'affaire suiïisanuuent instruite pour recevoir jugement définitif", el qu'elle était dès lors autorisée à prononcer an fond })ar l'art ^-'5 C. P. C. Piejettc. »

4'' EspîîCE. Le 5o ilécensbre i8i i, la Cour de Trêves a rendu un arrêt ainsi conçu (i) : » La Cour; attendu qu'il est à remarquer dans l'espèce de la cause, que l'aclion du de- mandeur avait pour objet de faire réisarer une spoliation com- mise par voie de fait, ce qui ne présentait qu'une contesta- tion de particulier à particulier, pour des intérêts privés, aucunement de l'intérêt du gouvernement; qu'il n'était pas question de concession de minerai ; que ce n'était donc pas le

(i) Ce l arrêt aurait ctù cassé s'il y avait eu pourvoi, parce que la cour n'a- ait pas statué de suite sur le fond. Voy. infià , n°» 9, 11 et 14.

ÉVOCATION. 3^3

cas, de la part des premiers inge";, de se déclarer incompé- lens, et de renvoyer les paitiei? devant l'aulorilé adminislra- tive; Qu'il est d'autatit plus étonnant qu'ils se soient dé- terminés à déclarer cette incompétence , <iue , malgré que le détendeur en eùtexcipé devant eux à llminc litis, ils ne s'y étaient pas arrêtés, et avaient prononcé un interlocnloire qui avait traitai! fond de la cause; interlocutoire qui . quoiqvie exécuté d'nne manière irrégulière et nullement conforme aux règles prescrites par le Code de procédure, seniblait néanmoins devoir être suivi d'une décision au fond; —D'où jl suit que le jugement attaqué est susceptible d'être an- nulé, et qu'il y a lieu d'évoquer le fond, d'après les disposi- tions de l'art. 4/5 du Code précité. Par ces motifs, ayant aucunement égard aux conclusions des parlies, annulle le ju- gement dont est appel; et faisant ce cpie les premiers juges auraient faire, ordonne que les parlies plaideront au fond, et ce à la prochaine audience ; condamne l'intimé au dépens de première instance et à ceux faits jusqu'à ce jour en cause d'appel ; ordonne la restitution de l'amende con- signée. «

5p Espèce. Le 28 janvier 1810 , la Cour de Nismes a dé- cidé le môme principe. Son arrêt sera rapporté v" Trihunaux. OliSEUVATIOiNS.

Pour bien apprécier l'étendue du pouvoir accordé par l'ar- ticle 473 aux tribunaux d'appel, il faut se ratîacher aux prin- cipes qui concernent l'ordre des juridictions.

Si le législateur a voulu que dans tous les cas une con- testation soumise d'abord aux juges de première instance serait ensuite portée devant un tribunal d'appel ^ ce tribunal eût le droit de terminer la contesîalion par une décision dé- finitive, il ne i'a voulu (jue dans les limiles du pouvoir de ces tribunaux d'appel; on ne peut pas croire qu'il ail changé, étendu, modifié la compétence de ces tribunaux, par une disposition placée dans le Code sous la rubrique de l'appel , lorsque, dans aucun article, le Code n'a réglé la juridiction

37/, ÉVOCATION.

des tribunaux. Quant aux principes généraux, il a s'en référer, cl il s'en est référé aux lois précédentes qui les déter- minaient. De ces lois il résulte que les tribunaux de première instance et les Cours royales ne peuvent connaître que des causes qui ont été portées devant les tribunaux de leur res- sort, et que même ils soiÉt incompétens pour en connaître si la matière n'excède pas une valeur fixée. L'ordre public a exigé une exception à ce jjrincipe général, et l'art. 454 a dévolu aux tribunaux d'appel toutes les causes la compétence des tribunaux de première instance aurait été contestée.

Ainsi, lorsque l'ari. 4/3 accorde le droit d'évoquer aux tribunaux d'appel qui infirment des jugemens définitifs pour quelque cause que ce soit, cet article ne leur confère qu'un droit relatif, c'est-à-dire, en rapport avec l'étendue de leur juridiction.

Quoique cet article soit conçu en termes si généraux qu'il semblerait repousser l'interprétaiiou que nous lui donnons, il ne peut être révoqué en doute que la force des choses ne fasse admettre'quelques exceptions nécessaires; 1"' exem- pte : Un incapable intente une action, le tribunal de première instance l'accueille ; appel ; la Cour infirme ; peut- elle évoquer? Non sans doute , a dit avec raison la Cour de Bourges (voy. infrà ii" 5), parce que, après le jugement sur cet incident, l'action elle-même est annulée.

Celte question a été soulevée devant la Cour de cassation, dans l'affaire Ouvrard C. Seguin; mais une circonstance par- ticulière a fait rejeter le pourvoi ; c'est que les commissaires de la faillite, intervenus sur l'appel, avaient conclu au fond; et en lisant attentivement l'arrêt de la Cour suprême rap- porté J. A., t. 29, pag. 258, on verra que la Cour n'a été dé- terminée que par cetic circonstance;, et que , s'il n'y avait pas eu de conclusions, elle eût cassé inévitablement. On lit en effet , dans un de ses motifs, qu'en fait les con?missaires n'ont pas droit (le se plaindre de Véxoc^l'ion puisqu'ils ne se sont pas éornés à intervenir dans {'instance d'appel pour de-

ÉVOCATION. 575

mander terenvoide (a demande au tribunal de commerce^ 'pour y subir te premier degré de juridiction ; mais qu'ils ont conclu au fond- Ils n'avaient conclu au fond que subsi- diairenient ; mais, à nos yeux , ces conclusions en appel dans une intervention , suffisaient pour donner à la Cour le droit d'évoquer. Car, ou ils avaient le droit d'intervenir, et alors ils avaient ic droit de former tierce opposition au jugement de première instance; ou ils ne l'avaient pas, et alors leurs conclusions subsidiaires ne leur servaient de rien , parce qu'ils étaient non recevables. Dans le premier cas, elles étaient inutiles, parce qu'il leur suffisait de faire annu- ler le jugement" qui, il faut bien remarquer cetle circon- stance, se trouvait annulé forcément, si on les déclarait recevables à iniervenir ; ainsi , dans le premier cas , sans con- clusions subsidiaires, entièrement inutiles, ils étaient sûrs d'obtenir gain de cause; ces conclusions subsidiaires , (|ui ne pouvaient servir qu'en cas d'admission de leur intervention , devaient donc, aux yeux de la Cour royale, être considérées comme une renonciation au premier degré de juridiclion. Toutes ces considérations tendent à faire apprécier la portée de l'arrêt Ouvrard, qui ne préjuge pointlaqucstion décidée par la Cour de Bourges; mais, dans cette affaire, le vice de la procédure devra faire stn'ir la justesse des conseils que nous donnerons en finissant à messieurs les avoués. Quoi qu'il en soit, M. Ouvrard avait soumis la question d'évocation aux membres les plus distingués de trois barreaux, à nos plus célèbres jurisconsultes , et ils furent unanimes pour déclarer qu'il n'y avait pas lieu à évoquer. La consultation de Paris fut signée par. MM. Delacroix-Frainville, Bonnet, Gairal , Tri- pier, Guichaid, Brunetitrre , Di'.pin , Berriat St-Prix, Cbi- gnard, Lassis et Gaudry; celle de Rennes, rédigée par M. Toui- ller, et ap[)rouvée par MM. Carré et Gaillard de Kerberliu ; celle de Poitiers, rédigée par M. Boncennc, et signée par MM. Guillemot et Bera. Nous pensons que nos lecteurs nous sauront gré de leur donner deux passages de cette dernière

376 ÉVOCATION.

consultation dans laqnelie le savant auteur de la théorie de la ]jrocédui'6 expo&e les principes en matière d'évocalion, avec sa précision et son éléjjance de slyle ordinaires.

Il commence en ces termes :

« La jurisprudence n'offre rien de bien arrêté sur la ques- « tion ; il faut s'attacher aux principes pour la discuter.

« Le plus incontestable de ces principes, c'est que le juge 0 d'appel ne peut foire que ce que le premier juge aurait « faire et li'a pas fait. Ainsi se trouve consacrée et garantie 0 la règle des deux degrés de juridiction; ainsi les juges d'ap- « pel ne peuvent recevoir une demande nouvelle ^ puis- « que cette demande n'aurait subi l'épreuve que d'un seul « degré. Autre conséquence : toutes les lois que le premier juge a pu et juger le tond d'une contestation portée de- « vaut lui , cl qu'il ne l'a pas fait, en s'arrêtanl mat à propos « à des moyens d'incompétence ou de nullité, le premier degré de juridiction a été rempli , car il n'a dépendu que du a premier juge de statuer : il le pouvait et il le devait. Il en « est de même si le jugement qu'il a- rendu est entaché de « quelque vice déforme, car il pouvait et devait juger régu- le lièrement; le tribunal d'appel, réformant et substituant un « nouveau jugement au premier jugement nul , n'enlève point « aux parties le premier degré. Par une conséquence con- « traire , mais tout aussi vraie, si le juge de première instance « a jugé quand il ne le pouvait pas, par exemple, si la de- « mande était nulle, le juge d'appel, réformant et déclarant 0 la nullité de la demande, ne peut évoquer le fond. Une « demande nulle ne donne pas au fond le premier degré de « juridiction. Le premier juge ne devait pas juger; le juge <' d'appel, institué pour faire ce que le premier juge pouvait « et devait faire, ne peut donc ni ne doit juger le fond. Ce « qui est nul ne produit au<un effet ; une demande nulle ne « présente qu'une nullité, et l'on ne peut évoquer le néant. »

Et il termine ainsi :

« La seconde partie de l'art. 475 présente une latitude

ÉVOCATION. , - ^77

0 d'expression qui, au premier aspect, peut faire naître le i doute ; mais en y regardant de plus près, il est facile de voir « qu'il n'y a là, pas plus que dans ce qui précède, aucune a exception a la règle des deux degrés de juridiction. I! a déjà <i été démontré que, lorsqu'un jugement était annulé par une « Cour royale, pour vice de forme, celte nullité n'affectant « que le jugement, et la demande ayant été régulièrement « introduite cl instruite, il n'y avait pas violation du premier 0 degré de juridiction dans l'évocatioîi du fond. C'est encore <• le cas de dire que le juge d'appel , en substituant un juge ., « ment régulier à un jugement irrégulier, ne fait que ce que « le premier juge aurait faire. ; i",:>h

u Ces mots , soit pour toute autre cause, doivent s'inter- « prêter par leur rapport nécessaire avec ce qui précède et . . «avec l'esprit de tout l'article; ils indiquent une analogie ;, « avec les exemples déjà donnés, et non pas une dérogation « aux principes que ces exemples sont destinés à établir; ils . , , « assimilent aux vices déforme, expressions qui auraient pvi « paraître trop restreintes, toutes les irrégularités et tous les « accidens qui i^euvenl vicier un jugement,

u Mais il ne faut pas perdre de vue que l'art. 47^ C. P. C. , « ne permet aux Cours royales d'évoquerque pour des causes w.., « qui vicient les jugemens, parce que les degrés de juridic- ,j, , « tion sont parcourus dans ce cas. Si le tribunal inférieur, \ ,-. . « qui devait juger le fond ne l'a pas fait , ou s'il l'a jugé nulle- w « ment, le premier degré est rempli; il si'cst plus nécessaire- , j ; « d'obliger les parties, arrivées en appel, de retourner devant. . « les juges inférieurs pour parcourir encore une fois le cercle .- i'. « des deux degrés de juridiction. La preuve que le législa- j . -, « teur l'a ainsi entendu , c'est que , dans la discussion de l'ar-. .y,, «ticle, l'on regarde la seconde partie comme une consé- i.-K] B quence toute naturelle et toute simple de la disposition « contenue dans la première.

u On lit ce qui suit dans les observations du tribunal : Çô.^ j, « qu'oix a dît du cas ie trihunal d'appel infirme un uj' XII. a

3:8 ÉVOCATION.

gement préparatoire ou interlocutoire, s' applique, à plus a forte raison, a%i cas le tribunal cV appel réforme, u pour vice de forme on toute autre cause , te jugement « de première instance. H serait dérisoire que tes tribunaux

n^ eussent pas alors la faculté de prononcer sur le fond.

a Ce n'est pas de cette manière qu'on se serait exprimé , si « l'on eût vouln inirodr.ire dans l'article une innovation im- « portante et nne exception si remarquable à la règle des o deux degrés de juridiction.

« Tout seréduiuioiicà ce point bien simple: ie premier juge 0 n'a-t-il pas jugé le fond quand il pouvait et devait le juger? « Il y a lieu à l'évocation sur l'appel. Il en est de même si le « jugement de première instance est entaché de quelque vice H ou ii'régalarité ; il a dépendu des premiers juges de statuer « sur le fond; les juges d'apj)el, en réformant, font ce qu'il» 0 auraient faire.

a Mais .si la demande était nulle, el si, par conséquent, « les premiers juges ne [louvaient pas juger, les juges d'appel « ne peuve.".t pas plus juger, puisqu'ils doivent faire seule- « ment ce qui aura êSre fait en première inslance ; ils ne a peuvent donc point évoquer dans ce cas. »

2'' Exemple. En première instance, on demande la nullité de l'exploit inlrodutlif, le tribunal rejette ces conclusions; appel; la Cour infirme, peut-elle évoquer ? Non, a dit encore la Cour suprême {infrà n" lo), parce que l'acte qui avait saisi la Cour, et qui ne pcutêtre que l'exploit inlroductif , n'existant plus, elle est dessaisie, par le fait, de la contestation.

5' Exempte. En première instance, un tribunal accueille une action contre un avocat. La Cour annuUe le jugement pour n'avoir pas été précédé de l'avis du bâtonnier; peul-elle évoquer? Non, a di! la Cour de Grenoble; parce que le pre- mier degré de juridiction n'a pas été rempli d'une manière régulière (J. A., t. 54? !>• i63).

Nous adoptons entièrement lu jurisprudence de ces trois Cours, et comme ces principes ne se trouvent contestés par

ÉVOCAÏION. 379

aucun auteur, lii par aucun arrêt, nous croyons pouvoir en tirer des conséquences îa-vorabie,-; au système que nous avons adopté. (Voy. M. Delaporte, tom. 2, pag. 36. ) Car si, dans un cas donné, les tribunaux d'appel sont lorcés, malgré les termes de l'art. 475, de délaisser les parties à se pourvoir de- vant qui de droit, et de ne pas juger îeur?. contestations, comment ne verrait-on pas une exception au principe d'évo- cation dans le cas oia Terreur seule des premiers j;iges aurait constitué leur compétence, surtout lorsqu'on lit. dans l'ex- posé des motifs, qu'il y a lieu à évocation iorsqu'aprcs in- firmalion d'un jugement, la matière est réellement disposée à recevoir une décision définitive, puisque, dans ce cas, les premiers juges ayant prononcé sur le fond, déjà deux degrés de juridiction ont été remijlis. Le législateur a toujours sup- posé que la cause était ?u^:ceptible de deux degrés de juri- diction.

MM. Carré, t. u, p. 241, w 170.5 et B. S.-P. , p. 411, note 27, n"4> s'élèvent avec force contre l'opinion con- traire, et ce dernier auteur termine en disant (ju'en suivant en ce cas le système de l'évocation, il n'y aurait pas de juge- ment en dernier ressort, qui ne pût être réformé par un tri- bunal d'appel. Cependant il n'y a pas unanimité parmi les Cours. (Voy. J. A., t. 27, p 4^ et 5o. t. 5o, p. i5o et la note, e* t. 54, p. 317. j La Cour d'Angers est la seule qui ait pensé avoir le droit d'évoquer. .-: , ) .:; . ,,

M. Carré ajoute (|ue l'arrêt du 22 juin 1812, rapporté in~ frà, n" 19, a jugé [)0sitivement la question ; nous ne le pen- sons pas; il faut bien examiner les faits . et on verra que , sans animler, le tribunal avait évor[ué; ce qui entraînait la cassation de toute évidence. Seulement on peut tirer de fortes inductions des motifs de l'arrêt, comme de ceux d'une autre décision en date du ?4 aortt iHi<j (in frà , nn'.iG), da^îS lesquels on lit ces mots : L'incoinjyétcv ce des vrcmiers juges n'a pu empêcher ta Cour de statuer elle-même, iarsqu'citc

380 EVOCATION.

n'excédait pas tes limites de sa compétence déterminée

par l'action introductive d'instance

C'est ainsi que le 3o novembre i8i4 ( voy. infrà, 21 ) , la Cciu- suprême a cassé le jugement d'un tribunal qui avait évoqué, après avoir décidé que la cause était pélitoire , parce qu'il n'était plus alors tribunal d'appel. On peut consulter infrà, n" 7 , l'arrêt du 7 juin 1810 qui décide que lors d'une demande en renvoi pour connexité , la Cour ne peut évoquer si le premier tribunal n'est pas dans son ressort.

Nous devons craindre que les termes généraux de l'art. 470 ne puissent {'ournir un argument bien puissant contre noire inlerprélation , surtout lorsque nous sommes forcés d'admellre , qu'excepté les deux cas dont nous venons de parler, la Cour qui infirme le jugement sans annu- ler l'aclion, peut évoquer lors même qu'elle annulle un ju- gement, comme ayant été rendu par un tribunal incompé- tent, pourvu toutefois que le tribunal devant lequel l'affaire eût être portée soit dans son ressort.

Cependant, quoique en général les auteurs soient d'un avis conl'airc, ne deyrail-oii pas dire avec l'orateur du gouverne- ment, que pour qu'il y ait lieu à évocation, il faut que la cause ait été discutée au fond devant les premiers juges, et comme M. lioncenne, que les juges d'appel ne peuvent évoquer que dans le cas oij un premier juge aurait juger, et qu'il ne l'a pas fait, ce qui cerîes n'a pas eu lieu , lorsqu'il a fait ce qu'il ne devait [ias faire. Nonfecil quod potuit, il y a lieu d'évoquer; fecit quod nondebuit, et quod non potuit^ il y a lieu à ren- voyer. — Cependant la Cour de cassation, le 24 mars i825 (J. A., t. 29, p. 210), et la Cour de Grenoble, le 24 janvier 1826 ( J. A. , t. 5i, p. 87) , nous paraissent avoir donné une plus grande extension au droit d'évoquer; car dans les deux es- pèces, les tribunaux de j)remièrc instance n'auraient pas recevoir l'aciion, et par conséquent on devait leur appliquer 'axiome : Facerunt quod non potuerunt.

Nous avons cru devoir soumettre nos doutes à nos lec_

ÉVOCATION. 38 1

teurs; ils pèseront, d'un côté, lu gcuéîviliîé des feinjes de l'art, 475, et de l'autre les pri:icipes ([ui concernent l'ordre des juridictions. Nous devons leur faire connaître quel est l'état actuel de la jurisprudence, et quelles sont les diverses opinions des auteurs.

Plusieurs fois les Cours royales et la Cour de cassation ont eu à se prononcer sur la question d'incompélence, et la Cour de Poitiers seule s'est refusé le droit d'évocation en pareil cas, le 29 juillet 1824 (J. A., tom. '^7, pag. ^S); mais on peut opposer à cet arrêt plusieurs autres sous la date des 28 juillet, 20 août et 6 décembre 1821 , iG mars 1822, 11 juin 1824, 22 mai 1824, 24 août 1823, 2- février 1826, 16 no- vembre et 24 décembre 1820, et 7 février 1826, rapportés J, A,, tom. 20, pag. 252, 285 et 569; t. 24, p. 82; t. 27, p. 5o; tom. 28, p. 243; t. 3o , p. 1 85 et 021 ; t. 3i , p. 91.

On peut aussi voir infrà, n°' 6 et 17, les nombreux arrêts qui ont décidé 3a question de savoir si une Cour peut évo- quer lorsqu'elle annulle le jugement, comme rendu par un tribunal irrégulièrement composé.

De tous les auteurs, le premier et le plus célèbre de tous a montré une bésitalion qui indique s;.^.aisamnient la dif- ficulté de la matière. M. Carré, tom. 2, pay. 258, note pre- mière , nous dit quHt est évident que tejutja nt pourra pas évoquer lorsque la cause se trouvera dans un tlat tel que (e tribunal de première instance n\iit encore pu tut-mêtnô prononcer sur te fond ; comme lorsqu'il a- été déclaré que le premier juge avait été incompétanmcnt saisi , l'instruc- tion devant , dans ce dernier cas, être nécessairement considérée comme non avenue.

Cependant, pag. 240 et 241, n" 1704,00 savant auteur examine précisément la question de savoir si la Cour qui an- nulle un jugement parce «pie les [)remiers juges se seraient mal à propos déclarés incompétens , ; (turrait évoquer le fond , et après avoir rappelé toute la jurisprudence et les di- verses opinions qu'il avait tour à tour embrassées dans ses

382 EVOCATION.

ouvrages, il finit à la note i de la page 341 , par dire qu'il professerait !a doctrine de M. Berriat SaiiU-Prix, c'est-à-dire la négative, si l'arrêt du 24 août 18 19 ne lui donnait pas à craindre qu'elle ne fût reietée.

Enfin , dans son dernier ouvrage sur la compétence , M. Carré s'exprime ainsi (tom. 1 , pag. loG) : L'article li'^'ô . par ces mots pour toute autre cause, exclut toute distinc- tion relativement à ia faculté de retenir , et d'un autre côté elle ne subordonne ie renvoi aux premiers juges à au- cune condition ; mais nous devons dire qu'à la uote i4 > M. Carré fait remarquer qu'il ne donne qu'un résumé de la doctrine qu'il a développée dans ses lois de la procédure.

31. Berriat Saint-Prix , tom. 2, pag. 4^^ ) "^te ii2; n" 1, et p. 4'54? "♦^^'^ n'a. pense que, si le tribunal d'appel annulle le premier jugement pour incompétence, il est obligé de ren- voyer la cause au tribunal qui devait former le premier de- gré ; mais que le tribunal d'appel peut évoquer si le premier )Uge s'est mal à propos déclaré incom'iétent, pourvu toute- fois que le fond de la cause ait été agité devant lui.

M. Pigeau , Com., lom. 2, pag. 56, va plus loin, et il pro- fesse que îe premier degré de juridiction n'a pas été rempli lorsque ie triùuîial de première instance s est mal à propos déclaré incompétent , et que dans ce cas, la cause doit lui être renvoyée. Dans sa Procédure civile, t. 1 , p. 620, n" 14 > il ne soulève aucune des difficultés de révocation.

M. Demiau-Croijzilhac, pag. 354, adopte entièrement l'o- pinion de M. Pigeau.

M. Hautefeuille, p. 274? sembleadopteruneopinion contraire.

Les auteurs du Prat. français, tom. 3, pag. 228, après avoir retracé toute l'ancienne jurisprudence, qui, comme on l'a vu , n'était basée sur aucun article ds loi positif, et avoir pesé les raisons présentées à l'appui des deux opinions pour l'évocation en cas d'incompétence, embrassent celle de M. Berriat Saint-Pris, par le molif que le Code n'a point entendu porter atteinte à la hiérarchie judiciaire , et per-

ÉVOCATION. 383

mettre à une Coin- de statuer sur une cause qui n'ctail pas de la compétence du tribunal de première instance ; que ce tribunal ait jug6 inconipétemment , ou n'ait pas jugé, c'est la même chose ; un jugement rendu par un juge in- compétent est mit, et ce qui est nul ne peut produire d'effet.

Quant à 31. Merlin, on peut le consulter hu Répertoire, Évocation, § 2, toni. 4, pag. 90D, et Moulin, § 8, toni. 8, pag. 434 et suiv. ; et aux Questions de droit , v" Ap- pel s § i/\, n" 4 , toui. 1, pag. i47- Quoique cet honorable jurisconsulte ail écrit sous l'empire de l'ancienne jurispru- dence , nous rapportons ce qu'il a dit sur la question, parce que ses paroles peuvent éclairer sur les principes qui concernent les degrés de juridiction. « Déclarer nul et inconipétemment rendu, te jugement d'un irihunat de première instance, c'est juger que les parties n'ont pas plaidé légalement devant ce tribunal; c'est juger qu'elles n'ont pas encore joui aux y eux de la toi d'un premier de- gré de juridiction. Dès que faut-il faire ? Il faut néces- sairement renvoyer tes parties à se pourvoir devant qui de droit. Car te juge d'appel ne peut pas être compétent pour prononcer comme tel, lorsque te tribunal de première ins- tance ne L'a pas été pour juger à charge d'appel. »

Si l'art. 4/^ présente dans son application des difficultés aussi graves, c'est souvent à cause d'un vice de procédure , qu'il est facile à MM. les avoués de faire disparaître. Ainsi , lorsque devant le tribunal d'appel ils ont à demander Tan- nulalion du jugement de preniiêre instance , soit pour un vice de forme, soit pour une violation des lois sur la compé- tence , ils ne doivent conclure que sur l'excepîion , parce qu'alors ce tribunal ne peut évoquer, attendu que la matière n'est pas disposée à recevoir une décision définitive; nous n'ignorons pas que MM. les avoués renferment dans les mê- mes conclusions les moyens de forme et les moyens du fond, pour éviter les frais, parce que des conclusions séparées né- cessiteraient deux arrêts; mais d'abord en agissant autre-

-ji. nu iii (Çi;' .ij '

584 ÉVOCATION.

ment, leur conduite ne pourrait être blâmée, puisqu'ils ne le feraient que pour éviter l'interprétation trop large donnée à un article du Code avi préjudice de leurs clients, et qu'en- suite , en prenant des conclusions sur la forme et sur le fond , ils concèdent par cela même implicitement au tribunal d'ap- pel le droit d'évoquer, puisqu'ils mettent la cause en élat de recevoir une décision définitive. Nul doute, à nos yeux, que dans une cause le litige n'excéderait pas 1,000 fr. , un avoué d'appel n'eiU le plus grand tort de prendre des conclu- sions sur le fond, parce qu'on pourrait peut-être en iuduire